Christian Laurenson
Chargé de promotion de la voie technologique et industrielle et ancien Proviseur du lycée général et professionnel Étienne-Mimard à Saint-Étienne
Christian Laurenson a découvert Ilyse à l’occasion du premier appel à projets lancé par la Fondation « L’industrie pour les 11-16 ans : tout un monde à (re)découvrir ! ». Il revient sur l’arrivée de la Fondation et son impact sur le milieu de la formation, des lycées professionnels aux CFA.
Dans quel contexte s’inscrit l’arrivée de la Fondation Ilyse ?
Je suis un fervent militant de la valorisation du territoire. Ça fait longtemps que je pense que nous devons faire en sorte que sur un espace de vie, tel que celui formé par les métropoles de Lyon et de Saint-Étienne, les acteurs de la formation de l’insertion professionnelle apprennent à se connaître pour mieux se rassembler et se compléter. C’est un vrai besoin. C’est pourquoi, la fondation ILYSE arrive à point nommé. Elle allie les deux métropoles et fait écho aux politiques de valorisation du territoire, ce qui est essentiel pour les centres de formation que sont les lycées, les CFA publics et privés. Nous avons tout intérêt à ce qu’une politique volontariste soit menée afin permettre au plus grand nombre de connaître le monde industriel et de reconnaître son impact sur la vie quotidienne.
Qu’attendez-vous d’Ilyse ?
Ilyse offre aux projets sélectionnés un pilotage qui booste et sécurise tout à la fois. Avec un objectif que je partage totalement : celui de la massification des projets. Pouvoir toucher le plus de familles et de collèges possibles, c’est essentiel. En ce sens, Ilyse est un facilitateur, un accompagnateur. C’est essentiel, car un chef d’établissement tel qu’un lycée a pour mission, en plus de l’enseignement, de traiter avec les élèves, les familles et les équipes enseignantes de questions aussi importantes que la citoyenneté, le harcèlement scolaire ou encore le développement durable. Sans compter la réforme du baccalauréat qui mobilise à 200 % les professeurs ! Vous imaginez aisément que la question de l’orientation dans les métiers de l’industrie n’est pas nécessairement toujours prioritaire… Bref, on a besoin de toutes les aides qui se présentent, qu’elles soient d’ordre financier ou d’accompagnement notamment sur la structuration des projets en vue de pérenniser leurs actions. Ilyse réunit toutes ces conditions. Tout en imposant d’aller vite puisque l’une de ses exigences est que chaque projet atteigne son autonomie financière dans les deux ans.
Il faut que le monde industriel investisse encore davantage dans l’information et la communication en direction des 11-16 ans, car à ces âges-là tout est encore possible.
Concrètement, comment se traduit l’apport d’Ilyse sur le terrain ?
Pour le projet ELO, l’un des cinq lauréats du premier appel à projets, le financement accordé par Ilyse permet de développer le projet, de le faire grandir et de mettre plus de moyens à disposition pour un maximum de massification. Par exemple, ELO intègre dans son budget le transport des élèves en bus, sans demander une prise en charge financière par les établissements scolaires. Ensuite, le fait que 30 entreprises signent la charte du projet et s’engagent à prendre des élèves en stage, c’est très concret également. Donc, pour ELO, Ilyse est un booster et un facilitateur extraordinaire. D’une façon générale, j’ajouterais un autre « effet secondaire » bénéfique d’Ilyse : ne plus mettre en concurrence les lycées mais en faire des partenaires réunis autour de la même table. Nous sommes en train de passer d’une distribution de budget par lycée à la délivrance d’un budget par projet afin de servir à tous les lycées impliqués. Une vraie petite révolution !
Qu’espérez-vous du milieu industriel dans ces démarches de médiation auprès des collégiens ?
Il faut que le monde industriel investisse encore davantage dans l’information et la communication en direction des 11-16 ans, car à ces âges-là tout est encore possible. Certes, les organismes professionnels, les associations les dispositifs départementaux voir régionaux proposent des temps d’information, mais une fois qu’ils ont choisi leur voie au lycée, il est parfois un peu tard pour certains élèves en échec. Quand j’invite des chefs d’entreprise industrielles à visiter nos outils de formation, je leur dis : « parrainez, prenez des jeunes en stage pour les collégiens, en périodes de formation pour les lycées ou en apprentissage pour les autres » c’est le meilleur moyen pour fidéliser des élèves qui seront vos futurs employés. Très souvent ils sont d’accord mais ils recherchent souvent l’élève parfait ! Celui qui, selon son bulletin scolaire, va réussir à coup sûr et qui est libre dès demain. Je les arrête tout de suite en leur disant qu’ils doivent aussi « parier » sur des jeunes en difficultés socialement ou qui n’ont pas le meilleur bulletin scolaire, une stabilité psychologique pas toujours facile, pour essayer ensemble de leur donner le parcours éducatif et professionnel qui les font évoluer favorablement et devenir de bons professionnels et de bons citoyens. L’enjeu est aussi là ! On ne choisit pas nos élèves dans nos lycées, on accueille tous ceux qui nous sont affectés, point. Alors, allons « capter » parmi les 11-16 ans les futurs citoyens qui auront une meilleure connaissance du monde industriel, afin de leur permettre de concevoir la formation professionnelle comme un parcours scolaire possible.
Même si l’effet n’est pas immédiat, Les parents seront convaincus quand les jeunes auront vécu des situations en stage ou en visite qui leur ont ouvert les yeux sur le monde industriel.
Enfin, il est essentiel d’arrêter de dire que nous orientons les jeunes, et là je m’adresse aux équipes éducatives. Notre rôle n’est pas d’orienter mais d’accompagner un jeune et sa famille à faire ses propres choix les plus éclairés. Et rappeler à tous, qu’aujourd’hui, un jeune qui passe un bac pro, suivi d’un BTS voire d’une licence pro, c’est un parcours de réussite qui offre très souvent un emploi reconnu !